” tu viens, chéri ? “
Le rêve est toujours une autre vie. L’histoire ne s’y superpose qu’en se déformant. Farouche à toute approche, immense, somptueux, cassant les cadres dans les zigzags de la bizarrerie, il saute les ans et nous emmène ailleurs là où règnent des clartés à forme humaine et où de vieilles fées filent au milieu des ruines. Quelque chose peut jaillir du rien, une jeune fille d’une grâce inaccessible vous attend à l’entrée d’un maison délabrée. Ce monde de l’impossible s’écroule souvent à l’instant où j’y arrive, quelquefois après que j’y aie vécu, bu, mangé, fait l’amour plusieurs nuits dans une âcre volupté. Nymphes déhanchées et ondoyantes des sources, vues de profil en remontant depuis la cheville vers les genoux, cuisses et hanches. Dames blanches, noires ou rouges qui passent, glissent et hâtent le pas. Si les mères sont puritaines, catholiques, vieilles et trop horribles, je prend sans vergogne leurs filles sur l’oreiller en pensant aux grands amours d’autrefois. Une fois réveillé, je vis ensuite pour quelques heures de mille questions faites à ce monde imaginaire. (extrait de Joie dans les ruines, 2023)